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Le Goulp

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Saison 1

C’était il y a très très très longtemps. En ce temps là, il y avait le ciel. A droite du ciel, il y avait la planète Gibi. Elle était complètement plate, et elle penchait soit d’un côté, soit d’un autre. A gauche du ciel, il y avait la planète Shadok. Elle n’avait pas de forme spéciale, ou plutôt, elle changeait de forme. Au milieu du ciel, il y avait la Terre, qui était ronde et qui bougeait. Sur la Terre, il n’y avait apparemment rien. Sur la planète Gibi, il y avait des animaux qui s’appelaient les gibis, voici un gibi vu de près, en voici un autre. Quand il y avait trop de gibis d’un côté, la planète penchait, les gibis glissaient, et il y en avait qui tombaient. C’était très gênant, surtout pour les gibis. Sur la planète Shadok, il y avait des shadoks de deux sortes : des Shadoks avec des pieds en bas qui vivaient au-dessus de la planète, et des shadoks avec des pieds en haut, qui vivaient de l’autre côté, et qui servaient à soutenir la planète par en dessous. Comme la planète Shadok changeait de forme, il y avait des shadoks qui tombaient. C’était très gênant, surtout pour les shadoks. Les shadoks et les gibis en eurent donc assez au bout d’un certains temps, de vivre sur des planètes qui ne marchaient pas bien, alors ils décidèrent les uns et les autres d’aller sur la Terre qui avait l’air de mieux marcher.

Les shadoks et les gibis qui vivent sur des planètes différentes ont décidé d’aller sur la Terre. Mais ce n’était pas si facile que ça. Les shadoks ressemblaient à des oiseaux. Ils avaient un bec, des pattes, mais leurs ailes étaient ridiculement minuscules. Au début, les shadoks pondaient des œufs ordinaires, mais comme ils avaient de trop longues pattes, ces œufs là se cassaient. Maintenant, les shadoks pondent des œufs en fer. Il y en a de deux sorte : les œufs avec les pieds en bas, et les œufs avec les pieds en haut. Ces œufs là, on les envoie de l’autre côtés de la planète. Les Shadoks sont excessivement méchants. Chaque fois qu’ils essaient d’aller sur la Terre, avec leurs petites ailes, évidemment ça ratait.

Les shadoks et les gibis qui vivent sur des planètes différentes ont décidé d’aller vivre sur la Terre. Les gibis étaient de petits animaux très gentils avec un chapeau sur la tête pour pouvoir se dire : “bonjour” ! Et ils étaient très intelligents. Pour aller sur la Terre, ils ont construit une fusée. Elle fonctionne grâce à un combustible super puissant : le cosmogol 999. Dès qu’il y aura suffisamment de combustible, la fusée gibi pourra partir. Mais quel est ce combustible miracle, d’où les gibis l’extrayaient ? Comme vous le savez, la planète gibi est plate. Dès que l’on creusait un trou, on tombait de l’autre côté. Les gibis ne peuvent donc rien extraire du sous-sol, sans cela, leur planète serait une vrai passoire. Les gibis extraient le cosmogol 999 de l’atmosphère. Celle-ci est recueillie dans d’énormes entonnoirs à atmosphère, puis pompée dans des pompes à atmosphère. Par un procédé secret, les gibis en extraient du cosmogol brut, dit cosmogol de première pression, qui une fois raffiné, concentré et enrichi, donne le fameux cosmogol 999 qui propulsera la fusée gibi. Mais, les gibis pourront-il produire assez de cosmogol pour arriver sur la Terre avant les affreux Shadoks ?

Propulsé par un combustible miracle, le cosmogol 999 extrait de l’atmosphère, la fusée des gibis va partir pour la Terre. Sur la planète Shadoks, les shadoks essaient de construire une fusée interplanétaire. Mais ils sont en retard sur leur programme, et le professeur Shadoko est inquiet. Il observe les progrès de la planète Gibi. Quelque temps après, chez les gibis, l’usine à cosmogol subitement s’arrête. La teneur en cosmogol tombe mystérieusement à zéro. Par quel scélérat engeance les shadoks ont-ils anéanti les réserves de cosmogol, et réduit la fusée gibi à l’impuissance ?

Sous la direction du professeur Shadoko, les shadoks ont construit une fusée interplanétaire. Mais il restait un problème : les shadoks n’avaient pas de carburant suffisamment puissant. Pour subtiliser celui des gibis, le cosmogol 999, le professeur Shadoko avait mis au point un plan. Nous avons demandé au professeur lui-même de nous dire deux mots de ce plan. “C’est très simple, pour que le cosmogol gibi vienne jusqu’à nous, il suffit que nous le pompions. Et nous le pompons grâce à cette pompe de mon invention d’une puissance incroyable de 3 millions de shadoks par heure. C’est pourquoi toute la population shadok pompait, pompait, pompait. Ils pompaient dans la joie, ils pompaient dans l’allégresse, mais pour le moment, dans le vide, car le cosmogol tardait à se manifester. Il y avait quelque chose qui n’allait pas dans le plan du professeur Shadoko. Mais quoi ?

Les shadoks n’avaient pas de carburant assez puissant pour faire partir leur fusée, alors ils essayaient de pomper le cosmogol gibi à travers le cosmos. Ils s’imaginaient que par la seule force aspirante de leur machine, le cosmogol consentirait à traverser les espaces infinis du cosmos, mais le cosmogol ne l’entendait tout simplement pas de cette oreille : les atomes de cosmogol étaient des atomes très lourds et très sérieux, qui ne changeaient pas de planète comme ça, pour un oui, pour un non, et les dérisoires efforts de ces pitoyables bêtes n’avaient pratiquement aucun effet. Le cosmogol restait suspendu dans le cosmos, à quelques encablures de la planète gibi. Mais, dès que les efforts des shadoks se relâchaient, soit qu’ils allassent se coucher, soit qu’ils tombassent épuisés, le cosmogol repartait, et tout était à recommencer. Certes, les Gibis s’inquiétaient au début de voir leur atmosphère aller et venir comme ça, sans rime ni raison, alors ils braquèrent leurs antennes de télévision, et quand ils virent les Shadoks sur leurs télévisions, ils ne furent plus inquiets du tout. Ils disaient : laissons faire les choses, de toute façon, les shadoks sont idiots, leur plan ratera, etc, etc… Et les gibis décidèrent d’aller à la campagne en attendant que le plan des shadoks rate, et se lassent de pomper, ce qui ne pouvait tarder.

En attendant que les shadoks se lassent de pomper et que le plan shadok rate, les gibis sont partis en vacances à la campagne. Ils en profitent pour se faire de nouveaux costumes : il faut se dire qu’en ce temps-là, quand ils voulaient changer de costume, les gibis mangeaient. Si un gibi mangeait des fleurs, ça lui faisait un costume à fleurs. Si un autre gibi préférait les petits pois, le lendemain, hop, il avait un petit ensemble à pois. Quand un gibi mangeait un jour par exemple des carottes, le lendemain par exemple rien du tout, un jour des carottes, un jour rien du tout, ça lui faisait un très joli costume rayé. Et les gibis, s’amusaient, s’amusaient, s’amusaient, tandis que pendant ce temps-là, les shadoks, eux, pompaient, pompaient, pompaient, ils pompaient le matin, ils pompaient l’après-midi, ils pompaient le soir, et quand ils ne pompaient pas, ils rêvaient qu’ils pompaient, ce qui revenait exactement au même, car la cosmopompe avait été spécialement étudiée. Mais plus ils pompaient, plus il n’y avait rien qui sortait, et le professeur Shadoko était inquiet. D’autant plus que la planète Shadok recommençait à se déformer, et donnait des signes de désagrégation imminente.

Chez les shadoks c’est la panique : leur planète était en train de changer de forme. Comme nos téléspectateurs le savent, la planète Shadok était soutenue dans l’espace par des shadoks spéciaux avec des pattes en haut qui empêchaient la planète de tomber. Mais ces shadoks là n’avaient aucun sens de leurs responsabilités et il arrivait même à certains d’aller se coucher, de sortes que quand ils étaient sur le dos, leurs pattes ne soutenaient plus rien du tout, et la planète aussitôt se déformait. Ou bien pour protester, ils se mettaient tous du même côté, et la planète devenait pratiquement inutilisable. Quand un shadok roulait à vélo, sur une route par exemple, la route pouvait tout à coup devenir un escalier, ou n’importe quoi. Et ils étaient obligés d’avoir des vélos spéciaux avec des roues de formes diverses pour faire face à toute éventualité. Et de même, quand ils montaient un escalier, ils n’étaient jamais sûr d’arriver en haut, ils ne savaient plus quels étaient les escaliers qui montaient, et ceux qui descendaient, et sauf quand c’était expressément indiqué dessus. Alors il arrivait souvent qu’avec un escalier prévu pour la monté, on réussissent à monter plus bas qu’on ne serait descendu avec un escalier prévu pour la descente. Dans ces conditions, la logique shadok ne reposait pas sur des bases solides, ce qui nuisait considérablement au développement normal de leur intelligence, spécialement en matière de fusée interplanétaire.

Chez les shadoks, rien de nouveau, ils pompaient toujours. Mais, plus ils pompaient, pompaient, pompaient, plus leur morale baissait, baissait, baissait, et malgré les efforts du professeur Shadoko, les shadoks épuisés tombaient par milliers. Alors, le chef shadok flanqué de son fidèle sorcier, fit venir Shadoko, et lui parla en ces termes : “GOULP !”. Et il le fit mettre au goulp… Il faut dire que le goulp était une sorte de trou dans lequel on entassait les shadoks qui n’avaient pas donné entière satisfaction. On l’appelait aussi quelquefois enfer, à cause que ceux qui étaient dedans étaient enfermés. Comme les Gibis l’avaient prévus, le plan Shadok a raté. Le cosmogol est revenu. Les gibis se dépêchent de rentrer de vacances et font le plein de leur fusée, si bien qu’en moins de rien ils sont prêt à partir pour la Terre ! Tout était-il perdu pour les shadoks ? Peut-être pas, car le sorcier veillait, et attendait son heure…

La pompe à cosmogol est arrêté, les shadoks épuisés refusent de pomper, mais il restait le sorcier. En ce temps là en effet, sur la planète Shadok, il y avait un sorcier. Il s’occupait plus spécialement d’astrologie, et c’est lui qui s’occupait par exemple tous les matins de faire le soleil se lever. Ca lui prenait le temps qu’il fallait, mais tous les jours il y arrivait, et à cause de cela, les shadoks le respectaient et l’adoraient. Comme tout cela lui laissait quand même pas mal de temps libre, entre-deux, il était plombier. Il détectait les fuites d’eau, et débouchait les lavabos. Il disait aussi qu’il lisait l’avenir dans son robinet magique, et le chef shadok lui-même venait le consulter souvent sur des problèmes de gouvernement ou des problèmes de robinets. C’est ainsi que, prenant la direction des opérations, le sorcier installe son robinet sur la pompe à cosmogol, et dit que fois de sorcier, on verrait ce qu’on verrait, et que le cosmogol sortirait de son robinet. Sortira-t-il, sortira-t-il pas ?

Le sorcier shadok a installé son robinet magique sur la pompe à cosmogol, et les shadoks repompent, comme d’habitude. Car telle semblait être la destinée de ces pitoyables bêtes : pomper, pomper, pomper. Mais du cosmogol, il y a longtemps qu’il n’y en avait plus, pour la bonne raison que les gibis avaient tout extrait et avait fait le plein de leur fusée, et tout était près pour leur grand voyage sur la Terre. Mais avant de partir, et en guise d’adieu à leur vieille planète plate, ils avaient organisé une grande fête. Ils s’amusaient comme des fous pendant tout le jour, et le soir, regardaient les shadoks à la télévision.

Les gibis, en guise d’adieu à leur vieille planète plate, faisaient des feux d’artifice, et lançaient des confettis. Mais les confettis étaient aussitôt aspirés par la pompe shadok. Le devin plombier, qui prenait ça pour du cosmogol, criait : victoire, victoire, le cosmogol est arrivé ! Et les shadoks s’empressaient d’entasser les confettis dans leur fusée comme un précieux combustible atomique ! Les gibis trouvaient ça très amusant, de voir leurs confettis aspiré, et ils en relançaient, et ils en relançaient, et plus les gibis s’amusaient, plus les shadoks pompaient, et plus les confettis n’arrêtaient pas d’arriver. Les gibis en profitèrent pour faire un grand nettoyage de leur planète, et se débarrassaient de toute sorte d’ordures gênantes, tels que papiers gras, pots de yaourt, peaux de bananes, et quantité d’autres détritus. Les shadoks prenaient tous ça pour un précieux combustible atomique, et en entassaient le plus possible dans leur fusée.

C’était il y à très très très longtemps. En ce temps-là, il y avait le ciel, au milieu du ciel, il y avait la Terre, et sur la Terre, il n’y avait rien, ou presque rien. La population de la Terre comptaient quelques bestioles pas très réussies, comme le gorlibu, le lapin-poisson, et le minécantrope, espèce qui était en voie de disparition rapide, plus un certain insecte du nom de Gégène, et qui n’avait pas l’intention de disparaître du tout, comme nous le verrons par la suite. A gauche du ciel, il y avait les shadoks et la fusée shadok. A droite du ciel, il y avait les gibis et la fusée gibi. Comme nos téléspectateurs le savent, les gibis avaient un petit chapeau sur la tête, et c’était là le secret de leur intelligence. Quand un gibi réfléchissait à quelque chose d’un peu compliqué, hop, il mettait ça dans son chapeau, ça passait automatiquement dans les autres chapeaux, et tous les gibis se mettaient à réfléchir ensemble sans qu’on ait besoin de leur expliquer. Pour la nourriture, il n’y avait pas de problème non plus, il y avait des gibis à pain, des gibis à lait, et des gibis à fromage. C’est dire, que pour aller sur une planète, même lointaine, les gibis n’avaient pas besoin d’emporter autre chose que leur chapeau, et tout ce monde là voulait aller sur la Terre. Réussiront-ils à partir ? Arriveront-ils même sur la Terre ? Que sont-ils devenus aujourd’hui ?

Les shadoks ont pompé les détritus des gibis, et veulent s’en servir comme combustible pour leur fusée. Les shadoks étaient venus nombreux assister aux premiers essais de leur fusée. Les vaillants shadoknautes avaient revêtus leur combinaison spatiale. Mais ces malheureuses bêtes n’avaient pas de connaissances spéciales en astronautique. D’ailleurs, elles n’avaient pas tellement de connaissances spéciales. On peut même dire qu’elles n’avaient pas de connaissances du tout. A chaque essai, la fusée retombait, et se cassait. Si bien qu’à la fin, ils essayèrent de faire partir leur fusée à la main, mais il ne se passa rien du tout non plus. Il ne se passa rien comme ça pendant un certain temps, et même davantage.

Pendant que les malheureux shadoks essaient en vain de faire partir leur fusée à la main, les gibis finissent d’aménager la leur. La fusée gibi comportait pas mal d’étages. D’abord, un premier étage propulseur contenant le combustible gibi d’une puissance infini : le cosmogol 999. Aux étages supérieurs, on trouvait une piscine chauffée entièrement aménagée, une salle de jeux avec balançoire, patins à roulettes, jeux de dominos, et autres appareillages hautement perfectionnés indispensables pour survivre sur l’écorce terrestre. Un étage carnaval avec manèges, montagnes russes et autres instruments de navigations indispensables pour la même raison. Un étage campagne avec des fleurs, des arbres, des petits ruisseaux, et des jardins potagers où les gibis cultivaient des légumes nécessaires pour subvenir à leurs besoins techniques : moteurs électriques et ioniques, microphones en grappes, gyroscopes, tubes de télévisions… Et dans les vergers, ils poussaient des antennes radars, des goniomètres, et des radiotélescopes. Tous ces instruments là donnaient des graines que l’on récoltait et quand on voulait en refabriquer, ils suffisaient de les semer dans des endroits adéquats. Ces dires qu’avec le vent, les gibis pourraient faire de la Terre une planète très confortable.

Les cosmonautes shadoks continuent leurs vols d’essais sous la direction technique du devin plombier. Ils travaillaient en étroite collaboration, mais on voyait bien que ça risquait de durer. Le marin shadok qui regardait ça disait même que la fusée ne partirait jamais. C’était un ancien quartier maître pirate qui avait mal tourné. Contrairement aux gens de son espèce qui passent généralement leur temps à introduire des petits bateaux dans des bouteilles, lui, il introduisait des bouteilles dans des petits bateaux. Il parlait par maximes, et quelquefois même, en anglais. C’est lui qui disait par exemple : “dans la marine, on ne fait pas grand chose, mais on le fait de bonne heure”. Et en effet, il partait dès potron-minet , soi-disant pour aller voir où était le vent. Mais le soir, quand il revenait, il avait complètement oublié : il disait qu’il était sous l’influence. En réalité, il était tout simplement pris de boisson. Pour la fusée, il disait que le plus simple était encore de subtiliser la fusée gibi, que lui connaissait le chemin, que lui il allait la subtiliser, lui, et en bateau. Naturellement, c’était insensé, mais comme il était un peu trop souvent sous l’influence, et qu’il constituait un objet de scandale, le chef shadok lui donna quand même l’autorisation. En fait, il se disait que c’était un moyen simple et élégant de s’en débarrasser. Le pauvre marin pourra-t-il tenir son pari et traverser le cosmos en bateau ?

Le marin shadok a décidé d’aller chez les gibis en bateau à travers l’espace pour subtiliser leur fusée. Il mettait la dernière main à une caravelle interstellaire de sa conception, et il se dépêchait de peindre tout ce qu’il pouvait. Car, disait-il, dans la marine, c’est un principe : il faut saluer tout ce qui bouge, et peindre le reste. Le jour du départ, de grandes réjouissances avaient été organisées. Et quand la shadok-caravelle fut inaugurée, on fit sortir du goulp quelques intrépides shadoks qui furent invités à ramer. Et ils partirent. Puis aussitôt après, et sans perte de temps inutile, on procéda à une autre inauguration, celle d’une magnifique statue où on pouvait lire : “à nos hardis marins perdus dans le cosmos”, car on savait déjà qu’ils ne reviendraient pas. Mais ces malheureuses bêtes, elles, n’en savaient rien, et si on les avaient laissées partir, c’étaient pour s’en débarrasser. Car de l’eau, il n’y en avait pas tellement, et au bout d’un certain moment, elle s’arrêtait, après quoi, il n’y avait plus rien, sauf évidemment le néant.

Chez les shadoks, la situation est satisfaisante, les essais de fusées continuent à très bien rater. Car c’était un principe de base de la logique shadok : ce n’est qu’en essayant continuellement que l’on fini par réussir, ou en d’autres termes : plus ça rate, et plus ça a de chance que ça marche. Et comme ils voyaient justement que les gibis ne faisaient aucun essai de fusée, ils étaient persuadés que c’étaient eux, les shadoks, qui seraient les premiers sur la Terre, et qu’elle leur appartiendrait. Ils commençaient donc à essayer très tôt le matin. Les essais ratait d’abord pendant toute la matinée : quand tout allait bien, on arrivait à en rater 6, quelquefois 7, mais c’était rare. Vers midi, ils prenaient un repas léger ; ça continuait ensuite jusqu’à la nuit. Et le lendemain, de très bonne heure toujours, ils recommençaient. Les gibis à l’autre bout du cosmos continuaient tranquillement à surveiller leur jardin, et à récolter des graines de moteurs électriques et de beaucoup d’autres choses pour les amener sur la Terre. Et le soir, comme d’habitude, en rentrant des champs, ils regardaient où les shadoks en étaient. Mais maintenant, c’était beaucoup plus amusant, car depuis que le marin shadok était parti en bateau dans l’espace, ils avaient 2 programmes, et s’ils en avaient assez de voir les shadoks rater leurs essais, ils regardaient les marins ramer. Quand ils avaient vu que ces innocentes bêtes espéraient arriver chez eux pour voler leur fusée, ils avaient cru d’abord mourir de rire ! Puis, ils avaient décidés de les laisser faire, car disaient-ils, ça valaient la peine de regarder de plus près des animaux aussi rigolos.

Pendant que les essais shadoks continuent à rater, les gibis surveillent leurs jardins à instruments. Ils voulaient emporter des graines d’instruments pour les replanter sur la Terre, et en attendant qu’elles mûrissent, pour passer le temps, ils regardaient les essais shadoks rater. Les essais de fusée shadok comportaient plusieurs phases : d’abord, les techniciens shadoks entonnent le compte à rebours sur un vieil air d’accordéon. Et puis, les shadoks les plus doués pour les mathématiques enfourchent leur ordinateur à pédale pour calculer la trajectoire. C’étaient eux qui avaient le plus de mal, car les shadoks avaient entendus que plus un ordinateur va vite, plus il donne de bons résultats. Et c’est celui qui avaient gagné qui avait trouvé la bonne trajectoire. On procédait alors à la mise à feu. Ca ratait, et aussitôt après, on recommençait. Naturellement, on pourrait continuer comme ça pendant longtemps même.

Les marins shadoks sont partis en bateau dans le cosmos pour conquérir la planète gibi. Voyons un peu où ils en sont. Et bien, ils ramaient, sous le commandement de principes du pirate shadok, qui comme par ordinaire était assez joliment pris de boisson. Si bien qu’en fait, personne ne regardait où on allait. Mais il disait que dans la marine, c’était l’usage, et qu’il est beaucoup plus intéressant de regarder où on ne va pas, pour la bonne raison que là où on va, il sera toujours tant d’y regarder quand on y sera, et que de toute façon, ce ne sera jamais en fin de compte que de l’eau, sauf naturellement après élu (??). Or, un jour justement, un marin s’écria : “chef, il n’y a plus d’eau !”. C’était vrai, et ils ne pouvaient plus avancer. Le marin shadok avait observé que l’eau, à l’avant des bateaux, avait souvent tendance à se transformer subitement en iceberg, en caillou, en baleine, ou même en rien du tout. Mais il avait remarqué aussi qu’à l’arrière des bateaux, il y avait toujours de l’eau qui ne servait à rien, et pour continuer d’avancer, il ordonna que l’on récupère cette eau là pour la mettre à l’avant, de sorte que pendant que les shadoks d’en haut ramaient l’eau, les shadoks d’en bas là récupéraient pour que ceux d’en haut la rerament. C’était un système de navigation ingénieux, mais épuisant, et on pouvait se demander si les valeureux marins pouvaient aller comme ça jusqu’à l’autre bout du cosmos.

Le marin shadok est arrivé à l’endroit du cosmos où il n’y a plus d’eau. Il avance quand même, mais comment ? C’est qu’en ce temps là, on pouvait aller en bateau dans le cosmos à condition d’emporter son eau. Mais malheureusement par endroit, le cosmos était percé, de l’eau, fatalement, on en perdait, et quand il n’y avait plus d’eau, on sombrait. Pour la remplacer, il fallait emporter d’énormes provisions d’eau, et souvent, il y avait plus d’eau dans le bateau, que sous le bateau, si bien qu’il y avait des shadoks qui périssaient noyés sans même que le bateau coule. C’était pas très confortable, mais c’était pourtant comme ça que les marins shadoks avançaient. Elles croyaient, ces naïves bêtes, traverser tout l’espace interstellaire et débarquer chez les gibis en catimini, pour leur voler leur fusée. Mais, il y a longtemps que les gibis les voyaient venir, et ils avaient décidé de leur jouer un tour pour que les malheureux marins continuent à ramer comme cela pendant toute l’éternité, et même peut-être plus.

Les gibis se préparent à faire face à un débarquement shadok sur leur planète. Mais, vous direz-vous, si les shadoks pouvaient aller en bateau de la planète Shadok à la planète Gibi, pourquoi n’allaient-ils pas directement, et par le même moyen, sur la Terre ? A cela, il y avait deux raisons : la première, relevée du second principe fondamentale de la logique shadok, qui disait : “pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?”. La seconde relevait de lois cosmiques beaucoup plus sérieuses : c’est, que pour aller sur la Terre, il aurait fallu monter, et que si on avait monté, l’eau aurait coulé, et très rapidement, il n’y en aurait plus eu. Les gibis, qui les voyaient arriver, se disaient : jouons leur un tour, camouflons notre planète, tirons des feux d’artifices ! Il faut dire que les gibis avaient des feux d’artifices spéciaux qui faisaient de l’obscurité, et quand on les tirait de jour on n’y voyait plus rien, et de nuit, il faisait encore plus nuit. Et les shadoks, ne voyant que de l’obscurité, continuaient à ramer vers les espaces extérieurs et apparemment infinis du cosmos. Ils ramèrent longtemps, longtemps, longtemps. Ils s’épuisèrent, dépérirent, désespérèrent, puis se pardonnèrent leurs péchés. Et le marin shadok lui-même noyait sa peine dans une sobriété exemplaire. Mais un jour, un pauvre marin s’écria : “la planète Gibi ! La planète Gibi !” Or, ce qu’il voyait là, vous le savez, ça n’était pas la planète Gibi. C’était quoi ?

Les marins shadoks perdus dans le cosmos ont vu quelque chose au bout de l’infini, et qu’ils prennent pour la planète Gibi. Mais il faut savoir qu’en ce temps là, le cosmos n’était pas tellement infini que ça. Il n’était pas infini du tout, et pour tout dire, il était plutôt rond. De sorte que, quand on partait d’un endroit, et en allant tout droit, au bout d’un certain temps, on y re-arrivait. Pour aller quelque part, le plus simple était encore de partir de là où on voulait aller. Et avec un peu de temps, et un peu de chance, on y arrivait effectivement. Mais les shadoks n’étaient pas au courant de ça, et au prix d’incroyables sacrifices, ces malheureuses bêtes allaient arriver là d’où ils étaient partis : c’étaient leur planète qu’ils prenaient pour la planète Gibi. Avec d’infinies précautions, ils débarquent nuitamment chez eux pour s’emparer de leur fusée, ils la transportent en catimini sur leur bateau, et ils repartent comme ils sont venus, mais en sens contraire, évidemment. Le lendemain matin, les shadoks, qui venaient comme d’habitude faire de nouveaux essais de fusée, furent d’abord étonnés, puis ils crièrent :“victoire ! Victoire ! Notre fusée marche enfin ! Elle est partie, elle est même partie toute seule !” La seule chose que ces pauvres bêtes avaient oubliées, malheureusement, ce… c’était de monter dedans !

Comme le cosmos en ce temps là était rond, les marins shadoks, croyant débarquer chez les gibis, ont débarqué chez eux, volé leur propre fusée, et sont repartis. Au bout d’un certain temps, naturellement, ils redébarquèrent chez eux, mais, comme il faisait encore un peu nuit, ils retournèrent se coucher en attendant d’être reçus triomphalement. Les shadoks, voyant leur fusée revenue, recrièrent :“Victoire, victoire, notre fusée marche ! Elle est partie toute seule, elle est revenue toute seule !” Et ils s’empressèrent de la retransporter de l’autre côté pour procéder incontinent à de nouveaux essais. Les marins, en se réveillant crièrent : “à l’abordage, à l’abordage ! Les gibis nous ont trahis, ils ont repris leur fusée !” Et ils repartirent aussitôt la rechercher. Il va sans dire que la chose dura comme ça pendant assez longtemps. Et pendant que ces pitoyables bestioles tournaient en boucle, les gibis cultivaient tranquillement leur jardin et récoltaient des graines d’usine pour les emmener sur la Terre. Quand ils plantaient une graine d’usine, la terre se transformait petit à petit en se qu’il fallait, tout cela se reliait ou se reliait pas suivant ce qui était écrit dans la graine, et au bout de tant ou tant de saisons, elles donnaient selon les cas, des bananes, des montres suisses, des noix de coco, des barres de fer, ou des bulldozers. Mais à un moment, les gibis s’arrêtaient et s’écriaient :“c’est l’heure des shadoks, c’est l’heure des shadoks !” Et ils couraient au bord de la planète pour les voir passer. Mais un jour, malheureusement, le jeu cessa, les shadoks ne passèrent pas, et les gibis étaient un peu tristes, car ils commençaient à s’y attacher. Qu’étaient devenus les pauvres marins shadoks ?

Les gibis sont inquiets : ils ne voient plus sur leurs télévisions les marins shadoks tourner en rond dans l’espace, que sont-ils devenus ? Et bien voilà, une nuit, comme d’habitude, les marins shadoks avaient débarqués chez eux pour s’emparer subrepticement de leur fusée. Ils avaient eu beaucoup de mal pour la ramener à leur bord, car la nuit était noire, et la mer, apparemment, avait monté. Ils avaient été obligés d’escalader l’eau pour monter dans leur bateau, et plus ils ramèrent, plus ils restèrent au même endroit, et au matin, ils y étaient encore. Ils s’étaient tout simplement trompés de bateau. Car, comme vous le savez, les shadoks, persuadés que les marins allaient vers leur perte, leur avaient à l’avance érigé un monument, et ils étaient montés dedans ! Quand les autres shadoks, voyant leur fusée revenu, une fois de plus, montèrent à l’assaut pour essayer de la récupérer, le marin shadok, lui, criait : “à l’abordage, à l’abordage, les gibis nous attaquent, car il croyait qu’il avait affaire à des gibis déguisés, et il les pourfendait. Le combat fit rage pendant des jours et des nuits. Beaucoup périssait, d’autres était plus ou moins définitivement estropiés, mais qui allait gagner ?

Les marins shadoks avaient embarqués dans leur statue au lieu d’embarquer dans leur bateau, les autres sont montés à l’assaut, la bataille fait rage. Ah ah ah ah ah ! Oh, pauvres bêtes ! Les marins se défendirent assez galamment, mais à la fin ils succombèrent sous le poids de l’adversaire très supérieur en armement, et en nombre. Et on leur dit que ce n’était pas parce qu’ils étaient revenus qu’on allait démolir un si joli monument, qu’on l’avait construit exprès pour eux, et qu’il était de leur devoir, à eux, aux marins, de disparaître effectivement, et ce le plus définitivement possible. Alors le marin shadok se fit corsaire de l’espace, et dit que foi de shadok, et foi de marin, il reviendrait et qu’il se vengerait.

Pour répondre à la demande de ceux de nos téléspectateurs qui n’ont pas eu la chance de suivre notre feuilleton cosmique depuis le début, nous allons résumer la situation. Nous avons à droite du ciel la planète plate des gibis. Quand elle était trop lourde d’un côté, elle penchait. Quand un gibi allait d’un côté, il fallait qu’il y en ait un autre qui aille de l’autre côté. A gauche du ciel, nous avons la planète à shadoks. Elle n’était pas pratique non plus : elle avait tendance à tomber par le bas. Il y avait d’une part des shadoks ordinaires avec des pattes en bas, qui n’étaient pas excessivement intelligents, et il y avait d’autre part des shadoks spéciaux avec des pattes en haut. Ils n’étaient d’ailleurs pas plus intelligent pour ça, mais s’ils n’avaient pas été là, il n’y aurait rien eu pour soutenir la planète dans l’espace, et elle aurait complètement tombée. Mais, de ces shadoks là, il n’y en avait pas partout, et là où il en manquait, ça s’affaissait, et les shadoks eux aussi voulaient aller sur la Terre. Leur fusée n’était pas très très au point, mais ils avaient calculé qu’elle avait quand même une chance sur un million de marcher, et ils se dépêchaient de bien rater les 999 999 premiers essais pour être sûr que le millionième marche. Avec ce genre de raisonnement typiquement shadok, les pauvres n’étaient pas près de partir, en tout cas pas comme ça…

Les shadoks continuent à rater le plus possible d’essais, et plusieurs fois par jour, entonnent le compte à rebours au son de l’accordéon. Tout ça, évidemment faisait pas mal de bruit, et les shadoks d’en bas, qui comme vous le savez, soutenaient la planète, s’en plaignaient. Ils disaient que ça les empêchaient de réfléchir, qu’ils en avaient assez, et que si tout cela ne cessait, ils iraient se coucher. Qu’ils ne soutiendraient plus rien du tout, et que la planète tomberait. C’était de l’intimidation pure et simple, car ils savaient très bien que si la planète tombait, eux tomberaient avec, et ça ne les intéressait pas vraiment. Mais ils protestaient quand même. Pour les apaiser, les shadoks d’en haut était obligés de leur envoyer d’énormes quantités de nourriture par des conduits spéciaux creusés à cet effet. Mais plus on leur en donnait, plus ils en redemandaient. Et quand il n’y aurait plus rien à manger, hein ?

Les shadoks d’en bas protestent : les essais de fusée font trop de bruit à leur avis, ça les gêne. C’était pourtant une fusée de luxe. Elle avait un premier étage bourré de détritus, qui devaient en principe servir de combustible ; un deuxième étage bourré de détritus indispensables pour vivre sur la Terre, et dans les interstices, on avait les shadoks. Elle était munie des dernier perfectionnements techniques tels que casserole à retardement, batteur d’air, et tire-bouchon hyper sustentateur. La seule difficulté, c’est qu’elle ne marchait que d’un seul côté seulement : de haut en bas uniquement, c’est pourquoi les shadoks avaient pensé qu’il serait intéressant de faire porter la fusée dans l’espace par les shadoks d’en bas. Ils avaient déjà soutenu une planète pendant pas mal de temps, et soutenir une fusée, à côté, c’était rien qu’ils disaient, ceux d’en haut. Ils leur avaient envoyés des plénipotentiaires pour négocier l’affaire, et les avaient fait descendre par les petits conduits. Ceux d’en bas d’abord s’étaient trompés et les avaient mangés, puis ils avaient répondus qu’ils n’étaient tout de même pas là pour porter leurs affaires. Leurs casseroles, leurs armoires, leurs détritus, et fusée par dessus le marché. De toute façon qu’ils disaient, ils avaient l’intention de rester ici pour rester tranquille. En réalité, c’était pas vrai : eux aussi voulaient déménager sur la Terre. Mais par quel moyen ?

Pendant que les shadoks et les anti-shadoks réglaient leurs histoires, la fusée des gibis est partie. Ca s’était passé un matin, sans difficulté… Et les gibis purent découvrir l’espace avec ses planètes, et ses paysages. En ce temps là, il y avait pas mal de choses à voir dans l’espace, et comme ils n’étaient pas très pressés, ils avaient décidés de faire un peu de tourisme cosmique. Quand ils trouvaient un endroit qui leur plaisait, ils s’arrêtaient pour pique-niquer, ouvraient leur fusée, et donnaient des représentations pour s’amuser, car le plus souvent, il n’y avaient personne pour les regarder, mais quelque fois, si, quand même. Il y avait les poissons de la planète à poisson, par exemple, qui montaient dans leurs arbres pour les regarder. Il faut savoir qu’en ce temps là, les poissons avaient des petites pattes et se promenaient dans les arbres aussi facilement que vous et moi, et les gibis les avaient fait tellement rire qu’ils en avaient versés des torrents de larmes, et quand les gibis avaient du partir, ils en avaient versés d’autres encore, si bien que les arbres avaient été obligés de nager. Et c’est depuis ce temps là que les arbres nagent, et les poissons aussi, d’ailleurs.

Les shadoks d’en bas eux aussi ont décidé d’aller sur la Terre pour être tranquille. Jusque ici vous direz-vous, nous avons laissé ces shadoks-là faire un peu ce qu’ils voulaient sans trop nous en occuper, et nous prions nos téléspectateurs de nous en excuser. Mais il se passait tellement de choses en haut que nous n’avons pas eu le temps de nous occuper de ceux d’en bas. Et bien, il s’y passait à peu près la même chose. Et si vous vouliez le savoir en détail, il nous suffirait de recommencer notre histoire à partir du début, et de vous montrer tout comme ça. Mais quand même… Pour résumer simplement les choses, disons que d’une part, leur haut était plus bas que le bas de ceux d’en haut, et que d’autre part, le bas était excessivement haut-dessus de leur haut de sorte que lorsqu’un shadok d’en bas voulait tomber d’en haut par exemple, il fallait qu’il saute de bien plus bas que si le haut avait été nettement au-dessous, c’est à dire, en réalité, au dessus de leur bas. Ou quelque chose comme ça. Pour le reste, c’était pareil. Et pour partir, ils avaient construit, devinez quoi : une fusée, évidemment, mais à l’envers. Restait à savoir si une fusée comme ça accepterait de marcher à l’envers dans un espace à l’endroit. Ou inversement.

Les shadoks d’en bas ont construit une fusée pour partir tout seul de leur côté. Ces bêtes scélérates n’avaient absolument aucun sens moral : elles voulaient partir pour que la planète tombe, et pour voir la tête que ceux d’en haut feraient quand ils se réveilleraient avec rien sous les pieds, mais ils avaient les mêmes problèmes que ceux d’en haut, à l’envers, évidemment. Et si la fusée d’en haut ne voulait pas monter, celle d’en bas refusait de descendre, et à chaque essai, elle remontait, et se cassait. Ils avaient fait appel pour la fabriquer à un spécialiste, justement, des fusées cassantes : le professeur Shadoko lui-même que vous connaissait bien, il avait déjà conçu la fusée d’en haut, et c’était une parfaite réussite, du point de vue cassage, il faut dire… C’était pour ça d’ailleurs qu’il était au goulp. Vous vous souvenez que le goulp était une suite de boyaux étroits, où les shadoks, dont on n’était pas excessivement satisfait étaient invités à se reposer. Mais les shadoks d’en bas y avaient creusé des sortes de petites trappes qu’ils ouvraient de temps en temps, rien que pour voir les autres tomber, ce qui les amusait passablement, les shadoks d’en bas, naturellement. Et ils avaient dit à Shadoko qu’il leur fallait les plans de sa fusée, sinon, ils le feraient sortir du goulp, eux, et pas du bon côté. Shadoko, évidemment, avait cédé, mais tout ça lui avait donné une idée.

Les expériences de fusée se poursuivent sous la direction du devin plombier. Or, le professeur Shadoko, qui était au goulp, comme on le sait, criait à travers les barreaux qu’il avait une idée géniale. Le chef shadok le fit sortir et il dit qu’il s’occuperait de la fusée en étroite collaboration avec le devin plombier. La concurrence, se disait-il, les stimulerait, et lui, pendant ce temps là, il pourrait retourner se coucher. Le devin plombier se servait exclusivement dans ses expériences scientifiques de son robinet magique, et quand la Terre était d’un côté, lui, avec son robinet, il la voyait par en haut. Et il disait que la fusée, il fallait donc bien la faire monter. Certes, ajoutait-il, on risquait de tomber où on était, mais ça valait quand même la peine d’essayer. Shadoko avait un télescope tellement usé que quand on regardait trop loin avec, les rayons se cassaient. De sortes que lui, il vit la Terre par en bas, et il disait que la fusée, il suffisait simplement de la laisser tomber. Certes, ajoutait-il, on risquait de ne pas aller exactement là où on voulait, ou là où on ne voulait pas, mais on était sûr au moins de ne pas revenir là où on était. Et comme justement la fusée ne voulait pas monter, ça prouvait bien que c’était son plan à lui qui était bon ! Lequel des deux avait raison ?

Les gibis continuent tranquillement leur route vers la Terre, et s’arrêtent de temps en temps pour visiter le cosmos. Le cosmos était un peu comme une campagne ordinaire, sauf que naturellement, tout était cosmique. Il y avait des arbres cosmiques, des petits poids cosmiques, des cascades cosmiques, et des quantités de choses cosmiques comme ça. Et puis un jour, en rentrant, ils s’aperçurent qu’il y avait un gibi qui manquait. Il était tout simplement resté dans les champs cosmiques à s’amuser. Et il disait que lui, les histoires de voyage, de fusée, de planètes, tout ça, ça l’intéressait pas, que lui, il voulait vivre sa vie de gibi, et qu’il voulait rester ici. Mais, le malheureux avait perdu son chapeau. Le chapeau des gibis, vous le savez, ça leur servait à réfléchir, et un gibi qui avait perdu son chapeau, pratiquement, c’était un gibi qui avait perdu la tête. Il avait fallu le faire rentrer de force, mais il s’était mis à tout saccager dans la fusée : il se faisait de la soupe avec les réserves de graines de gyroscopes, et de moteurs électriques, et il s’était mis à tourner, à tourner, soi-disant pour faire de l’électricité. Pour le faire tenir tranquille, on l’asseyait devant la télévision, et on lui faisait regarder les shadoks. Aussi bizarre que cela paraisse, ça le calmait, mais c’était quand même pas une solution : l’important, c’était de lui retrouver son chapeau, mais où avait-il bien pu l’oublier ?

Shadoko a trouvé que pour faire partir la fusée, il suffisait de la faire tomber. Alors les shadoks partent, c’est décidé ! Heureusement qu’ils partent, d’ailleurs, car depuis le temps qu’on en parlait, nous commencions à nous impatienter. Et bien non, ils ne partirent pas encore cette fois là. Figurez-vous que tout à coup, les shadoks et leurs ustensiles furent pris d’étranges convulsions : ils se tordaient, se déformaient, puis maigrissaient, maigrissaient, et à la fin, disparaissaient !! Ils avaient attrapés la Maladie. C’était la Maladie cosmique qui se promenaient dans les espaces interstellaires et qui surveillait. Quand il y avait des choses qui ne lui plaisaient pas, ou qui la gênaient, elle arrivait, et on n’en entendait plus parler. Or, les shadoks, justement, ça ne lui plaisait pas tellement. Des animaux aussi mal dessinés, elle disait, on n’avait pas idée de dessiner des trucs comme ça, elle n’allait tout de même pas perdre son temps, elle, à surveiller des bêtises pareilles. Alors, les malheureuses bêtes, terrassées par le terrible fléau, disparaissaient les unes après les autres. Bientôt, il n’y en aurait plus. La fin des shadoks, peut-être, avait sonnée…

La situation se complique : les shadoks sont malades et dépérissent, les gibis ont des problèmes avec un autre gibi qui est malade dans la tête depuis qu’il a perdu son chapeau. Pour le calmer, on le mettait bien à regarder les shadoks devant la télévision, mais tout le monde savait qu’il était très dangereux de regarder la télévision sans chapeau. Et à force, voilà qu’il se prenait pour un shadok, voilà qu’il se déguisait en shadok, voilà qu’il se jetait sur ses petits camarades, que tout ça, c’était de la mauvaise graine et compagnie, qu’il disait, et voilà qu’il voulait retourner voir son père, sa mère, et tous ses petits cousins, là-bas, sur la planète shadok. Il avait pris les commandes, il conduisait comme un fou, entrait sans ralentir dans les systèmes solaires, et passait le mur de la lumière. Il faisait dérailler les trains d’antimatière, et effrayait les troupeaux de nébuleuses qui s’enfuyaient en bellant. Mais là-bas, sur la planète shadok, la terrible maladie les attendaient : qu’allait-il se passer ?

Les shadoks sont en train de disparaître : ils ont attrapé la maladie qui fait rétrécir. En ce temps là, c’était facile : il n’y avait pas 36 maladies, il y avait LA maladie qui servait pour tout. Pour les pieds, pour les dents, pour la tête, et même pour l’intérieur. Quand un shadok marchait dans la maladie avec un pied, hop, il se rétrécissait. Et quand il marchait du côté où il y en avait moins, il se rétrécissait moins. De sorte qu’il se rétrécissait pas partout de la même façon. C’était amusant. Ses pattes, d’abord, se tordaient, ou se ramollissaient, la pauvre bête se traînait lamentablement comme ça, et puis, au bout d’un certain temps, les intérieurs étaient attaqués, le shadok tout entier se gâtait, maigrissait, maigrissait, et à la fin, disparaissait. Le devin plombier en principe les réparait avec son robinet magique qu’il disait ; en réalité, ils les jetaient tout simplement au goulp. Le professeur Shadoko, à côté, en profitait pour lui faire de la concurrence : il avait soi-disant mis au point un vaccin anti-maladie, mais les shadoks qu’il inoculait se gonflaient, se gonflaient, et à la fin, éclataient. C’était encore plus amusant, mais cela revenait au même, du point de vue de la santé. Si cela continuait, le problème du voyage sur la Terre, faute de voyageur, allait être définitivement révolu.

La planète shadok est infestée par la maladie cosmique, les uns rétrécissent, les autres, grâce au vaccin du professeur Shadoko, éclatent. Pendant ce temps, dans le cosmos, le gibi sans chapeau pilotait la fusée comme un fou sans s’occuper de rien, et fonçait droit sur la planète shadok et la terrible maladie. Le malheureux se prenait encore pour un shadok et voulait retourner dans sa famille. Il voyait des lumières sur la planète shadok, et il croyait qu’on tirait des feux d’artifices pour l’accueillir. Mais c’était pas ça du tout, c’était les shadoks inoculés qui éclataient ! De loin, bien sûr, ça faisait bien, mais de près… quelle pitié ! La maladie d’abord les contaminait, et les rétrécissait, ils ne mourraient pas tous, mais ceux qui survivaient, le professeur Shadoko se jetait dessus, lui, pour les inoculer. Les shadoks, évidemment, essayaient de se cacher, ils se camouflaient en n’importe quoi, en passoire, en ressort de lit, en tuyau de poêle pour échapper au terrible fléau, ou au vaccin du professeur Shadoko, mais rien n’y faisait, et la maladie engraissait, engraissait. Pour les uns, comme pour les autres, la situation dans son ensemble commençait à être assez désespérée…

La situation est désespérée, les gibis vont tomber dans la maladie, les shadoks, pour y échapper, se déguisent en passoires ou en ressorts de lit. Mais la maladie venait à bout des ressorts, s’infiltrait dans les passoires les plus étanches, s’infiltrait dans le goulp, découvrait d’énormes réserves de shadoks qu’elle rétrécissait, beaucoup périrent, et nourrie de shadoks, la maladie redoublait de vigueur et de méchanceté, si bien qu’à la fin, la planète elle-même se mit à rétrécir… D’autres périrent… Mais voyez comme les choses sont drôlement bête : le gibi fou dans la fusée, voyant que la planète rapetissait, criait :“Mais je recule, recule”, et il inversait les commandes si bien qu’il se mettait à reculer pour de vrai ! Et les gibis furent sauvés. Mais pour les shadoks, se fut autre chose : les pauvres bêtes paniquaient, sautaient dans la fusée sans même prendre le temps de se changer, les shadoks d’en bas sautaient dans la leur, or la fusée d’en haut, qui était à l’endroit, ne marchait pas à l’endroit, tandis que la fusée d’en bas, qui était à l’envers, ne marchait pas à l’envers, c’est à dire que dans une certaine mesure, elle marchait à l’endroit, et… BOUM ! D’autres encore périrent… Ceux qui tombaient en descendant essayaient de s’agripper à ceux qui tombaient en montant, ou bien ils se hissaient sur les ustensiles qui flottaient. Entre temps, à force de manger trop de shadoks, la maladie était tombée malade et laissa partir les rescapés. Et les uns entassés dans des tiroirs, les autres dans des casseroles ou des passoires, c’est ainsi que commença pour eux le long et pénible voyage qui devait en principe les amener sur la Terre.

La planète shadok a été rétrécie par la maladie, les shadoks font route vers la Terre entassés dans leurs ustensiles. Venait d’abord le chef shadok dans sa casserole personnelle, le devin plombier dans son lavabo, et le professeur Shadoko. Le reste de la population suivait comme elle pouvait. Il y avait des shadoks en boite, des shadoks en casserole ou à la poêle, et même des shadoks en tube. Evidemment, ils étaient un peu à l’étroit, mais ils avaient quand même le choix, car quand un shadok en avait marre de vivre dans un tiroir du haut, par exemple, il pouvait s’installer dans un tiroir du bas, et même vice et versa. Mais tout était plein de shadoks, et pour la cuisine, c’était pas pratique. Quand on voulait cuire des nouilles, par exemple, il fallait déménager les shadoks qui habitaient dans le fourneau. En attendant, on les installait dans l’eau des nouilles. Quand c’était cuit, on déménageait les shadoks qui habitaient dans la passoire, et on les mettait dans le fourneau. On passait une première fois pour récupérer l’eau dans le fourneau, on passait une deuxième fois pour récupérer les nouilles à part, enfin, on passait le fourneau pour récupérer l’eau. A ce moment là, les nouilles tombaient, et on pouvait recommencer. Quand il y avait vraiment trop de shadoks, dans les ustensiles, on en jetait au goulp. Mais depuis qu’ils n’avaient plus de planète, le goulp n’était plus qu’un trou avec rien autour, et les shadoks en trop se mettaient à tomber, ou tourner autour des planètes quand il en passait. On les appelaient des satellites. Et c’est depuis ce temps là, d’ailleurs, qu’il y a tant de satellites dans l’espace.

Le triste cortège des shadoks avance péniblement dans le cosmos, le plus grave problème reste celui du logement. Le moindre fer à repasser qui flottait, le moindre fil de fer devait en supporter des centaines. Et ça, souvent sur plusieurs étages : il y avait des shadoks qui servaient de plafond, des shadoks qui servaient de plancher à ceux qui servaient de plafond, et des shadoks qui servaient de cloison, et dans les interstices laissés libres, la vie à bord petit à petit s’organisait. Elle s’organisait mal, mais elle s’organisait tout de même. Pendant ce temps là, naturellement, ils se reproduisaient. Alors il en tombait, bien sûr, mais il n’en tombait pas du tout suffisamment, et la nourriture manquait. Certains essayait de pêcher des choses dans le néant, d’autres, désespérés, mangeaient les ustensiles qui les supportaient. Plus ils avançaient, plus il en tombait. Les gibis, de leur côté, continuaient à sillonner l’espace pour retrouver le chapeau du gibi fou. Ils avaient scruté partout avec leur radar, mais ils n’avaient rien à trouver, et eux aussi commencèrent à désespérer.

Entassés dans leurs tiroirs interstellaires, les shadoks sont sur le point de mourir de faim, les gibis sont toujours à la recherche d’un chapeau perdu dans le cosmos. Il faut savoir que les chapeaux des gibis étaient un peu comme des téléphones, mais tellement perfectionnés qu’il n’y avait même pas besoin de parler dedans. Il n’y avait qu’à penser, et ça émettait. Quand un gibi, par exemple, avait une musique dans la tête, tout les autres gibis pouvaient écouter. Ou bien ils n’écoutaient pas, ça dépendait. Or, un jour, c’était le chapeau perdu qui se remettait à émettre. Il y avait quelque part dans l’espace quelque chose qui pensait, avec le chapeau gibi sur la tête, et qui pensait plutôt mal : c’était un pauvre shadok affamé qui l’avait pêché. Il avait entendu dire que les chapeaux gibis servaient à réfléchir, et il se prenait pour un shadok intelligent. Il disait qu’il pensait. Les autres, qui n’avait jamais dit ça, naturellement le croyait. Mais les chapeaux des gibis marchaient dans les deux sens, et ils essayèrent d’insuffler au shadok une mauvaise pensée qu’il n’aurait pas pu avoir tout seul. Ca marchait ! Alors ils décidèrent pour passer le temps, de leur insuffler comme ça des quantités d’autres mauvaises pensées amusantes.

Un shadok a retrouvé dans l’espace un chapeau des gibis, les gibis en profitent pour lui insuffler de mauvaises pensées. Ils lui faisaient voir la Terre à droite, et ils allaient tous à droite, ils lui faisaient voir la Terre à gauche, et ils revenaient tous à gauche, à toute vitesse. A tout bout de champ, il criait :“Terre, Terre, Terre !” Les autres, naturellement, ne voyaient rien, mais ils avaient confiances, et ils y allaient. Quand ils arrivaient, ils voyaient qu’effectivement, il n’y avait rien. C’était quand même intéressant. De sorte que, partant pour ainsi dire de rien, les shadoks arrivaient au prix d’incroyables efforts, de sacrifices, et de souffrances, pratiquement au même point. Les gibis s’étaient arrêtés pour les regarder, de sorte que partant de rien, eux aussi, ils arrivaient en fait à la même chose, mais en se donnant beaucoup moins de mal, il faut le dire. Et puis, le shadok se mit à crier pour de vrai, car en effet, il y avait quelque chose de rond à l’avant : ils étaient sauvés. Ils l’avaient là enfin sous leurs yeux, cette Terre qu’ils avaient tant espérés. Et dans la solennité de l’heure, ils oublièrent les peines endurées, et en profitèrent pour se pardonner les uns les autres leur péchés, et la Terre, grandiose et seraine, émergeait peu à peu de l’infini, comme si elle naissait pour eux seuls, rançon de toute peine…

Les shadoks sont sauvés, ils arrivent sur la Terre : au fur et à mesure qu’ils approchaient, leur joie grandissait. Quelques uns moururent même de joie avant d’arriver. Et un bon matin, ils atterrirent, puis ils ressortirent de l’autre côté, mais plus mouillés, car évidemment, ils s’étaient trompés. Ce n’était pas la Terre qu’ils avaient là, mais ce qu’on appelait la planète à eau. La planète à eau était une planète ronde est normale, sauf qu’elle était faite exclusivement d’eau. Il y avait de l’eau en haut, de l’eau en bas, et même de l’eau au milieu. Les arbres, là où il y en avait, étaient évidemment obligés de nager : ça faisait de très jolies forêts aquatiques, et qui tenaient debout, sur l’eau, avec rien en dessous. Et les poissons volants, qui étaient les seuls habitant de la planète, venaient dans leurs branches pour se reposer et s’amuser. Mais les shadoks, eux, ne s’amusaient pas du tout : ils passaient leur temps sous l’eau, car ils étaient persuadés qu’ils étaient sur la Terre, et ils essayait de la trouver. Ils cherchèrent pendant assez longtemps. Puis un jour, le devin plombier eu une idée : puisque la Terre était par en-dessous, il disaient qu’il fallait simplement prendre l’eau, et la mettre à côté, et que lui, avec son robinet magique, et quelques shadoks volontaires, il en ferait son affaire.

Les shadoks sont sur la planète à eau. Ils croient que la Terre est en-dessous. Ils avaient installé un système compliqué de tuyaux pour pomper l’eau de la planète, et la mettre à sec. Les poissons volant, au début, trouvaient cela amusant, et venaient les regarder travailler. L’eau d’un côté commençait à baisser, et de l’autre, il y avait une petite planète qui se formait. Ils pompèrent comme ça pendant assez longtemps, mais pas le plus petit bout de terre n’apparaissait. Si bien qu’à la fin, ils pompèrent tout. Ils s’aperçurent enfin qu’ils s’étaient trompés, et qu’il n’y avait pas de Terre du tout. Il ne restait que les poissons volants, qui étaient, pour ainsi dire, obligés de nager à pied sec, et qui n’étaient pas contents du tout. Ils allèrent voir les shadoks, et en mangèrent un certain nombre. Puis, ils exigèrent qu’ils remettent leur planète là où ils l’avaient prise, et plus vite que ça. Et les shadoks, encore une fois, se remirent à pomper.

Les shadoks ont pompé toute l’eau de la planète à eau, puis ils la repompent pour la remettre en place. Pomper, pour les shadoks, à la longue, c’était devenu une habitude. C’est à la pompe, en effet, que la plupart de leurs travaux s’effectuait, ou ne s’effectuait pas, çà dépendait. Quand les shadoks se trouvaient devant un grave problème, et qu’ils voyaient pas très bien comment faire, et bien, ils pompaient. De toute façon, ils disaient, ça pouvait pas nuire. Ils avaient de grosses pompes pour les gros problèmes, et des petites pompes pour les petits problèmes. Ils avaient mis aussi des pompes spéciales pour les cas où il n’y avait pas de problèmes du tout. Et pour ceux de nos téléspectateurs pour qui la technique intéresse, disons que quand on pompait avec ça, non seulement il ne se passait rien comme avec une pompe shadok ordinaire, mais plus on pompait, plus il n’y avait rien qui ne se passait. C’était quand même une sécurité. Et dès que les shadoks avaient fini de pomper, les gibis leur envoyaient des visions. Les shadoks croyèrent voir la Terre, et ils y allèrent. En réalité, c’était n’importe quoi, comme par exemple la planète molle. Mais les shadoks pensaient que c’était uniquement un problème de mou, alors ils pompaient le mou avec leur pompe à problèmes mous. Et pendant que les shadoks allaient comme ça, de fausses Terres, aux fausses Terre, les gibis allaient s’installer tranquillement sur la vrai !

Pendant que les shadoks perdent leur temps à pomper n’importe quoi dans l’espace, les gibis se préparent à arriver sur la Terre, car la Terre approchait, et les gibis répétaient la grande fête qu’ils avaient organisés pour l’inaugurer. Mais vu de loin, la Terre n’avait pas l’air tellement, tellement bien. D’un peu plus près, ce n’était pas spécialement mieux, et de très près, c’était encore pire. Pour ne rien vous cacher, la Terre, en ce temps là, n’était pas si amusante que ça. Du point de vue des fêtes, en particulier, c’était pas du tout organisé, et il n’y avait personne pour s’en occuper. Il restait bien quelques dinosaures en retraite, mais ils disaient que les fêtes et tout ça, ce n’était plus de leur âge, et que de toute façon, ils étaient appelés à disparaître, ce qu’ils firent en effet par la suite comme chacun sait. Alors les gibis décidèrent de remettre un peu d’ordre dans tout ça, et passèrent un premier coup de peinture pour que ça fasse plus gai. Ils en profitèrent aussi pour repeindre les dinosaures, qui les remercièrent beaucoup de leur attention. La Terre, comme ça, était quand même plus présentable, et la grande inauguration pouvait commencer.

Les gibis ont gagné la course à la Terre. D’abord, il l’on repeinte pour que ça fasse plus gai, maintenant, ils vont inaugurer. Ils inaugurèrent la Terre pendant des années et des années. C’était facile, car quand ils avaient fini d’inaugurer, et bien, ils repeignaient tout d’une autre couleur, et ils recommençaient. Et pendant tout ce temps là, les malheureux shadoks tournèrent en rond dans l’espace, parce que eux, la Terre, ils ne l’avaient toujours pas trouvés. Ou bien quand ils tombaient sur une, elle était fausse. Alors, à force d’errer lamentablement de fausse Terre en fausse Terre, à la fin, quand même, ils finirent par tomber sur la vrai ! Alors, des nuages de shadoks menaçants envahirent la Terre, le ciel s’obscurcit, la fête de la Terre était finie, les gibis rentrèrent, il y avait du shadok dans l’air. Il en tomba, il en tomba, il en tomba pendant 40 jours et presque autant de nuit. La plupart en tombant, heureusement, se cassaient, alors ils virent bien que ce n’était pas avec des shadoks comme ça qu’on pouvait conquérir la Terre, et qu’il fallait en fabriquer des neufs, et plus vite que ça.

La plupart des shadoks en tombant sur la Terre se sont cassés. Il leur en faut des neufs pour conquérir la planète. Alors ils décidèrent de pondre des œufs de façon intensive, et que tout le monde s’y mettrait. Car chez les shadoks, en ce temps là, pour tout vous avouer, il n’y avait pas de shadok madame et de shadok monsieur. Tout le monde avait le droit de pondre des œufs. D’ailleurs, c’était facile, pour pondre un œuf, il suffisait simplement de compter jusqu’à 4. C’est dire que c’était uniquement une question d’éducation. Ca avait quand même des inconvénients, surtout pour ceux qui étaient trop éduqués. Quand les mathématiciens shadoks faisaient des calculs, par exemple 1, 2, 3, 4, 1, 2, 3, 4, sans qu’ils s’en rendent compte, il leur arrivait un œuf. C’est pourquoi les mathématiciens shadoks en temps normal ne comptaient que jusqu’à trois, et certains même jusqu’à deux, pour plus de sécurité. Et puis, quand il s’agissait de compter les œufs, et bien on pouvait pas savoir, parce que celui qui les comptait : 1 2 3 4, 1 2 3 4, obligatoirement, en repondait. Il fallait qu’il y en ait un autre qui passe derrière, pour recompter, lequel, à son tour, etc, etc, etc. Quand ils eurent pondu suffisamment d’œufs, alors ils les équipèrent, et attendirent patiemment qu’ils aient éclos et veuille bien partir conquérir la Terre.

Les shadoks ont pondu de grandes quantités d’œufs en arrivant sur la Terre. Ils attendent patiemment qu’ils éclosent pour partir conquérir la planète. Mais il y avait un inconvénient : c’est que les shadoks, comme vous le savez, pondaient des œufs en fer. Ils avaient trouvé ça astucieux étant donné que comme ils avaient de trop longues pattes, les œufs ordinaires se cassaient. D’un côté, évidemment, les œufs en fer, c’était pratique, mais d’un autre côté, pas tellement, car non seulement, ils ne se cassaient pas, mais ils ne se cassaient pas… ils ne se cassaient pas du tout. Si bien que quand l’œuf était mûr, en quelque sorte, le shadok qui était dedans ne pouvait pas sortir. Fallait avoir une clef, et leur clef à eux, ces imbéciles-là, l’avaient oubliés chez eux. C’était un spectacle vraiment affligeant de voir ces pauvres bêtes, qui pendant des générations et des générations s’étaient donnés tant de mal pour réussir des œufs incassables, s’en donner maintenant mille fois plus pour essayer de les casser. Vraiment, ça faisait pitié. Les œufs, naturellement, ne cassaient pas, mais le plus souvent malheureusement, il faut l’avouer, c’était le shadok à l’intérieure qui se cassait. Alors, alors au lieu de couver leurs œufs naturellement comme vous l’auriez fait vous et moi, les shadoks les mettait à rouiller. Et ça prenait… ça prenait pas mal de temps, et souvent, le shadok était déjà très vieux quand il sortait. Et ça valait vraiment plus la peine.

Les gibis passent tranquillement leur temps à repeindre les arbres et à chanter. Les shadoks, tant bien que mal, se sont multipliés, et partent envahir la Terre. Les shadoks avaient entendus dire que la Terre était ronde. Alors, ils avaient construits des engins exprès pour. Mais la Terre, en fin de compte, n’était pas tellement ronde que ça. Ou bien, dans certains cas, elle était ronde, mais dans l’autre sens. Et ça leur simplifiait pas les choses. Ils n’avaient pas peur, mais ils étaient prudents, parce que évidemment, l’ennemi, ils ne savaient pas quelle tête il avait. Les gibis les voyaient, mais ils disaient :“ne nous cassons pas trop la tête, laissons les venir, avec les shadoks, on ne sait jamais”. Mais ils avançaient, intrépides, et un jour… ils virent l’ennemi ! C’étaient des arbres, tout simplement, ou des bouts de cailloux qui dépassaient, mais les shadoks étaient pas habitués. L’ennemi ne bougeait pas, mais c’était une ruse, évidemment, ils pensaient, alors, les shadoks, beaucoup plus rusés, se déguisaient en ennemi, et bougeaient encore moins. Ils attendaient le temps qu’il fallait, et quand l’ennemi s’y attendait le moins, hop, ils lui sautaient dessus, et le faisaient prisonnier. Le jeu pouvait durer assez longtemps, d’autant plus que dès que les vaillants shadoks avaient le dos tourné, certains ennemis perfides en profitaient pour repousser ! Alors les gibis virent qu’il y avait encore de beaux jours à passer sur la Terre, tant qu’il y aurait des arbres et petits cailloux pour tenir les shadoks occupés…

C’était il y a très très très longtemps. En ce temps là, il y avait la Terre, d’un côté de la Terre, il y avait les gibis qui passaient tranquillement leur temps à repeindre la campagne et à chanter. De l’autres côté, il y avait les shadoks qui passaient leur temps à guerroyer contre les arbres et les petits cailloux. Et tout le monde apparemment était content. Au début de notre feuilleton, nous vous l’avions promis, les shadoks et les gibis devaient arriver sur la Terre, et bien les y voilà ! Et notre histoire pourrait s’arrêter là. Comme dans les belles histoires, on finirait en disant qu’ils furent heureux et qu’ils vécurent longtemps, mais ça serait vraiment abuser de votre crédulité. Car pour ne rien vous cacher, c’est juste au moment où notre feuilleton allait s’arrêter… que les vrais embêtements pour les uns, comme pour les autres, allaient commencer. Figurez-vous qu’un jour, les vaillants shadoks s’apprêtaient comme d’habitude à livrer bataille à un ennemi très supérieur en nombre, et ils sonnaient du cors pour l’effrayer. Puis, tout à coup… c’était… la bête… la terrible bête qui en ce temps là régnait sur la Terre, et les shadoks, ces imbéciles là, l’avaient réveillé. Elle répondait, la bête, au jolie nom de Gégène. Ou à n’importe quel nom, d’ailleurs, mais en général, il valait mieux pas l’appeler. Quand on vous disait que les vrais embêtement allaient commencer, vous vous rendez bien compte que ce n’était pas uniquement une façon de parler. Alors, notre histoire finira plutôt comme ceci : C’était il y a très très très longtemps. En ce temps là, il y avait la Terre, d’un côté de la Terre, il y avait les gibis, de l’autre côté de la Terre, il y avait les shadoks, entre les deux, il y avait Gégène, la bête qui les embêtait. Les shadoks et les gibis virent bien au bout d’un certains temps qu’ils ne pouvaient pas vivre sur Terre avec un Gégène comme ça, alors ils décidèrent les uns et les autres d’aller sur la Lune, qui n’avait pas de Gégène du tout…